Vous avez très certainement entendu parler des tonnes d’émissions de gaz à effet de serre (GES) produites par les activités humaines. Vous savez probablement aussi que ces GES contribuent au réchauffement global de la planète. Ainsi, pour éviter l’emballement climatique, il faut réduire les émissions de GES. Mais de combien? Et comment rapporter cela à notre échelle pour y donner du sens?
Chaque année, les activités humaines libèrent une cinquantaine de milliards de tonnes de GES.1 Cinquante milliards, c’est déjà une valeur difficile à se représenter. Mais quand en plus on parle de tonnes de gaz!
Nous avons assimilé le sens de plusieurs mesures dans notre quotidien. Nous savons, par exemple, ce que signifie une baisse de température de 5 degrés Celsius ou une prise de poids de 10 livres. Depuis quelques années, plusieurs parmi nous ont appris à comprendre le sens d’une calorie, notamment grâce aux étiquettes des valeurs nutritives affichées sur la plupart des aliments.
Malheureusement, de telles étiquettes n’existent pas (du moins jusqu’à maintenant) pour les GES. Dans ce texte, nous présenterons certaines valeurs de référence, pour donner du sens à ces informations névralgiques dans la très nécessaire lutte aux changements climatiques. Mais avant, un peu de contexte.
Viser la carboneutralité
La planète bleue a émis des GES bien avant l’apparition des êtres humains. Et c’est très souhaitable parce que la vie sur Terre est à la base du cycle du carbone. Par la photosynthèse, les plantes captent le gaz carbonique CO2 de l’atmosphère, conservent le carbone et rejettent l’oxygène nécessaire à notre respiration.
Or, le cycle du carbone est généralement équilibré : un arbre séquestre du carbone en grandissant, puis le relâche à sa mort, et d’autres arbres reprennent ce carbone relâché. Ce faisant, avec les millions d’années, certains organismes vivants, enfouis dans les fonds marins, le sol ou une tourbière n’ont jamais réellement relâché leur carbone. Sous certaines conditions, ces organismes peuvent même être transformés en pétrole, charbon et gaz naturel.
Avec la révolution industrielle, cet équilibre a été rompu. La croissance de l’économie s’est dès lors appuyée sur la combustion de ce carbone fossilisé. L’équilibre millénaire du carbone a été rompu avec pour conséquence les bouleversements climatiques actuels.
Tout ça pour dire que « la planète » absorbe naturellement une partie des GES produits. Les puits de carbone (tourbières, forêts, sols, océans) peuvent absorber des quantités impressionnantes de carbone, mais ils ne suffisent pas à séquestrer les surplus générés par les activités humaines.
La carboneutralité réfère à une situation où les GES émis par les activités humaines ne dépassent pas la capacité de la nature à les absorber. Si chaque être humain émettait 2 tonnes de GES par année, pas plus, la nature serait en mesure de les absorber. C’est à cet objectif de carboneutralité que se sont engagés plusieurs gouvernements, y compris ceux du Canada, du Québec et de la Ville de Gatineau, d’ici 2050.
Revenons à nos tonnes de gaz
Visuellement, une tonne de carbone gazeux correspond grosso modo à un quart du ballon d’une montgolfière.2 Mais cette image visuelle n’est pas d’une si grande utilité. Ce qui compte vraiment, c’est de saisir quelles activités génèrent ce gaz et permettent de gonfler cette montgolfière.
Selon les données préliminaires de l’inventaire des GES de la Ville de Gatineau3, 1 414 862 tonnes de GES ont été émis à partir du territoire gatinois en 2021, de quoi gonfler plus de 350 000 montgolfières… et, au rythme actuel, 500 nouvelles montgolfières sont ajoutées à chaque année.
Cela représente près de 5 tonnes de GES par habitant, ce qui est bien inférieur aux moyennes québécoise (9 tonnes) et canadienne (17,5 tonnes). En fait, le bilan gatinois exclut les émissions de GES provoquées par la consommation des Gatinoises et Gatinois, mais émises sur d’autres territoires. Comme peu d’activités industrielles fortement carbonées opèrent sur le territoire de Gatineau, les émissions moyennes paraissent faibles. Par exemple, le bilan exclut les émissions générées par l’élevage du steak mangé ici, par la fabrication de la souffleuse à neige ou par l’extraction et la distribution du pétrole qui fait avancer les voitures des Gatinois·es.
En 2017, la Ville de Montréal a estimé les émissions « provoquées » par la consommation sur son territoire et cela a fait plus que doubler ses émissions. Si on considère qu’une personne qui habite Gatineau consomme comme une personne qui habite Montréal, c’est plus de 12 tonnes de CO2 qu’elle émet à chaque année, gonflant ainsi 3 montgolfières. Quand nous faisons des calculs d’empreinte carbone par individu, nous constatons rapidement que ce 12 tonnes est plus proche de la réalité que le 5 tonnes suggéré par l’inventaire de la Ville de Gatineau.
Nous venons de voir que nos gouvernements se sont engagés à faire passer les émissions des personnes habitant l’Outaouais sous les 2 tonnes d’ici 2050. Nous avons donc 25 ans pour changer nos habitudes et passer de 12 à 2 tonnes émises chaque année. Où pourrions-nous couper? Suivez-nous sur le site web d’ACO ou sur notre page Facebook pour découvrir comment réduire vos émissions de 10 tonnes… ou deux montgolfières et demie! Impossible d’y arriver, vous allez voir, sans changer nos habitudes de consommation.
1 En fait, il s’agit de tonnes d’équivalent CO2, un indicateur qui permet de considérer les différents GES sur une même base. En fait, les différents GES (comme le gaz carbonique CO2, mais aussi le méthane CH4 et le dioxide d’azote NO2) n’ont pas tous les mêmes propriétés, notamment quant
à leur impact climatique : forçage radiatif et durée de vie dans l’atmosphère. Le CO2 étant le
principal contributeur aux changements climatiques, l’impact cumulé des différents GES est
converti en « équivalent CO2 ».
2 https://unpointcinq.ca/comprendre/tonne-equivalent-co2/
3 Aucun inventaire des GES ne couvre actuellement l’ensemble de l’Outaouais. Nous nous
limitons donc à la Ville de Gatineau.