Malgré la déclaration de l’urgence climatique et l’objectif de réduction des émissions des gaz à effet de serre, le territoire de la Ville de Gatineau n’a pas diminué ses émissions de gaz à effet de serre depuis 2015. Par ailleurs, malgré la réduction des déplacements liée aux mesures de distanciation pandémiques, le secteur des transports émettait 707 415 tonnes d’équivalent CO₂ en 2021, soit près de la moitié du total des émissions de la ville (données préliminaires de l’inventaire des GES).

Avec l’aménagement du territoire, le transport collectif constitue le meilleur outil de diminution de la consommation énergétique du secteur des transports (l’électrification y contribue aussi, mais accapare une proportion importante de l’hydroélectricité carboneutre dont il faut optimiser l’utilisation). Or, après quelques décennies de croissance, la part modale du transport en commun a été profondément affectée par les mesures de distanciation et la généralisation du télétravail. Cette réalité pancanadienne affecte davantage la région de la capitale fédérale où le principal employeur, la fonction publique, s’est le plus tourné vers le télétravail. Cette nouvelle situation a été un coup dur pour le transport collectif à Gatineau.

En effet, l’attractivité des transports en commun dépend grandement de la fiabilité et de la fréquence des passages, fréquence qui peut difficilement être maintenue sans que soit revu son mode de financement. La crise actuelle a déjà amené plusieurs utilisatrices et utilisateurs du transport en commun à revenir à la voiture individuelle, la pire des options du point de vue environnemental. Il est donc impératif de trouver des solutions à court, moyen et long terme afin de permettre au transport en commun de reprendre toute sa vitalité et de devenir l’option principale de transport intra urbain avec le transport actif.

Les municipalités du Québec ont, depuis peu, accès à une nouvelle option de financement de leur transport en commun avec la taxe sur les immatriculations. La Ville de Gatineau doit rapidement profiter de cette nouvelle avenue dans un contexte de crise climatique et de crise du transport collectif. À ce titre, Action Climat Outaouais (ACO) se réjouit des résultats du vote indicatif en faveur d’une taxe de 60 $ par immatriculation et espère que cette position sera maintenue lors du vote prévu le 14 mai.

Cela dit, nous sommes conscients que la proposition soulève une certaine controverse en contexte inflationniste sur un territoire où bon nombre de citoyennes et citoyens dépendent de leur automobile individuelle. Nous encourageons néanmoins les conseillères et les conseillers de Gatineau à voter en faveur de cette taxe. L’urgence climatique exige que l’offre de services de la STO soit maintenue et bonifiée.

Nous demandons cependant au conseil municipal de réfléchir, pour les prochaines années, à d’autres options de financement pour le transport en commun afin d’éviter que son financement ne repose que sur des mesures controversées. Il est possible d’envisager des arrangements qui favoriseraient l’acceptabilité sociale de la taxe et pourraient favoriser le transfert modal, par exemple un rabais à la STO équivalent à la taxe payée. Aussi, le financement du transport en commun pourrait venir d’autres paliers de gouvernements ou d’autres postes budgétaires à la Ville de Gatineau. Une solution à plus long terme serait d'effectuer graduellement un transfert des sommes importantes actuellement consacrées à l'extension du réseau routier vers le développement du transport en commun.

Notez enfin que si plusieurs Gatinoises et Gatinois dépendent de leurs automobiles, plusieurs autres, et souvent les plus vulnérables, dépendent du transport en commun. Les réductions de service du transport collectif ont un impact direct sur le quotidien de plusieurs citoyennes et citoyens qui n’ont pas les moyens ou la possibilité de circuler en automobile individuelle.

Fournir à la population de Gatineau un système de transport en commun efficace et abordable n’est pas seulement incontournable pour combattre les changements climatiques, c’est aussi une façon efficace d’aider la population à faire face à la hausse du coût de la vie. C’est une question de justice climatique.